Doctrine Juridique |
Le décret n° 2011-1473 du 9 novembre 2011 relatif aux formalités de communication en matière de droit des sociétés a notamment réformé le régime juridique applicable à la publicité des fusions et scissions.
Un nouvel article R. 236-2-1, inséré au sein du Code de commerce, donne une alternative aux formalités de l’article R. 236-2, lequel prévoit l’insertion d’un avis, par chacune des sociétés participant à l’opération de fusion ou scission, au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC) et, dans le cas où les actions de l’une au moins de ces sociétés sont admises aux négociations sur un marché réglementé ou si toutes les actions de l’une d’entre elles au moins ne revêtent pas la forme nominative, l’insertion d’un avis supplémentaire au Bulletin des annonces légales obligatoires (BALO).
Cette insertion au BODACC n’est pas requise «lorsque, pendant une période ininterrompue commençant au plus tard trente jours avant la date fixée pour l’assemblée générale appelée à se prononcer sur le projet de fusion ou de scission, la société publie sur son site Internet le projet de fusion ou de scission, dans des conditions de nature à garantir la sécurité et l’authenticité des documents». L’article R. 236-2-1 poursuit : «Cet avis contient les mêmes mentions que pour celui prévu à l’article R. 236-2 et peut être consulté sans frais.»
Le texte exige que le site ne soit pas inaccessible pendant une période ininterrompue de plus de 24 heures. A défaut, il faut procéder à une publication au BODACC.
Selon les mêmes modalités, l’article R. 236-3-1 dispose que la mise à disposition au siège social des documents prévue à l’article R. 236-3 (c’està-dire du projet de fusion ou de scission, des rapports d’information, des comptes annuels approuvés par les assemblées générales et des rapports de gestion des trois derniers exercices des sociétés participant à l’opération ainsi que, le cas échéant, d’un état comptable) n’est pas requise lorsque la société les publie sur son site web.
A la question de savoir si une société pouvait disposer du site web d’une autre société de son groupe, la Chancellerie a répondu par la négative, même s’il s’agit du site web de sa société mère.
Une autre question posée par ces textes est de déterminer en quoi consistent les «conditions de nature à garantir la sécurité et l’authenticité des documents». Nul ne saurait garantir une sécurité absolue sur l’Internet. Faute de prescriptions techniques, il faut sans doute se référer aux bonnes pratiques en matière de sécurité.
D’un point de vue pratique, les sociétés sont confrontées à la question des moyens à mettre en oeuvre pour respecter les dispositions précitées, à commencer par le fait de disposer d’un site web. Dans la mesure où les textes n’exigent pas d’en avoir un déjà existant, une société peut en créer un à dessein.
Dans ce cas, sauf si la société dispose des moyens en interne, il lui faudra se rapprocher rapidement d’une web-agency et négocier avec celle-ci un contrat pour la publication de son site web.
Ce site web publiera le projet de fusion/scission, ainsi que, le cas échéant, les documents visés à l’article R. 236-3, ce qui est très simple sur un plan technique, outre les mentions requises par la loi pour la confiance dans l’économie numérique.
Il pourra également être envisagé de stipuler, d’une part, des obligations renforcées en matière de sécurité et de garantie d’authenticité des documents et, par exemple, la mise en place d’une alerte en cas d’attaque du type «defacing» (modification du contenu du site) et, d’autre part, une obligation de reporting sur le maintien en ligne ininterrompu pendant 30 jours. Le recours à un huissier de justice en vue de se ménager la preuve de la publication du site à une date déterminée est par ailleurs possible.
Mais, dans le cas d’un site web nouvellement créé pour les besoins du projet de fusion, la question de son référencement sur les principaux moteurs de recherche et donc de la capacité des tiers à accéder à l’information publiée, pourrait se poser. A défaut de mesures de publicité du site sur le web, par une campagne de référencement notamment, il restera invisible de l’internaute actionnaire «moyen». Il convient de préciser que si les pratiques du référencement peuvent être optimisées, l’inverse est également vrai…
Régis Carral, avocat associé & Frédéric Guénin, avocat
Article publié pour la première fois dans l'hebdomadaire Option Finance - Supplément du numéro 1174 du 21 mai 2012
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